En Ariège, une caisse commune alimentaire est en cours d’expérimentation. Le principe est basé sur celui de la Sécurité sociale : vous cotisez en fonction de vos revenus et vous obtenez un bon de 50 euros chaque mois pour acheter des produits locaux de qualité. Explications.
Des agriculteurs qui n’arrivent plus à vivre de leurs productions. L’inflation qui touche particulièrement le secteur alimentaire. Le réchauffement climatique qui menace des ressources naturelles essentielles. Face à ce constat et ces difficultés croissantes, le Pôle d’équilibre territorial rural de l’Ariège et des habitants ont mis en place un nouveau système participatif pour lutter contre la précarité alimentaire et soutenir les producteurs locaux. Il s’agit d’une caisse commune alimentaire en phase de test dans une petite dizaine d’épiceries du département.
« Faciliter l’accès de tous à une nourriture de qualité »
L’expérimentation a été lancée courant janvier. Et actuellement, neuf épiceries rurales sont partenaires de ce dispositif solidaire. « L’épicerie ne gagne rien du tout. On fait zéro marge. On essaye de faire tourner les producteurs locaux pour les aider à se développer. Et l’objectif pour les adhérents, c’est de leur permettre d’accéder à des produits de qualité au prix producteur, voire parfois moins cher« , nous explique Mickael Vannier, un adhérent.
« On est en France, on est un des pays les plus riches du monde et il y a 20% de la population qui ne mange pas à sa faim. Il y a des agriculteurs qui ne vivent pas de leur travail« , renchérit Romain Clappier. Le coordinateur de la caisse commune alimentaire nous explique le principe. « On considère que tout le monde a le droit de bien se nourrir, qu’importe son revenu. Et on veut aussi soutenir une agriculture qui soit bonne pour la santé et l’environnement. Comment ça marche ? Tout le monde a le droit à 50 euros à dépenser pour des produits locaux.«
C’est financé par les cotisations, comme à la Sécu.
Romain Clappier, coordinateur de la caisse commune alimentaire
Les cotisations se veulent équitables. Elles sont établies en fonction du revenu des bénéficiaires.
Économie solidaire et participative
L’idée, c’est de permettre à des gens qui n’en ont pas forcément les moyens de s’acheter de bons produits locaux. Et tous les bénéficiaires mettent donc la main au portefeuille, l’équivalent de 2.5% de son revenu mensuel. En échange, chacun se voit créditer de 50 euros de bon d’achat chaque mois.
« Moi, j’ai une petite rémunération, je donne 10 euros et je peux bénéficier des 50 euros, nous confie Sandrine Voile. C’est une très bonne action sur le principe de la Sécurité sociale que je trouve intéressante pour les petites rémunérations comme moi qui peuvent bénéficier du coup de cet avantage-là. » Et la jeune femme, productrice de poulets fermiers, approvisionne l’épicerie dont elle dépend en produits frais et conserverie. La vente directe aux consommateurs lui tient à cœur.
Ne pas faire quinze kilomètres pour aller faire ses courses. « C’est très pratique, on a tout sur place« , nous dit, ravie, Dominique Vicaire. Elle cotise plus qu’elle ne reçoit de crédit sur son compte à l’épicerie, mais cela ne la dérange pas le moins du monde. Au contraire. « Cela permet d’aider des gens à manger. Cela repose sur le volontariat et l’envie de faire marcher cette caisse. » Le tout dans la convivialité. « C’est comme un grand groupe d’amis.«
Objectif : une carte vitale de l’alimentation pour tous
En ce début mars 2025, cinquante personnes participent à cette caisse commune de l’alimentation en Ariège. Durant cette phase d’expérimentation, il vous faut vous inscrire dans l’une des neuf épiceries participantes où votre compte sera crédité. « Mais l’objectif à terme, c’est que tout le monde ait sa carte vitale alimentaire, avec la même somme créditée dessus pour faire ses courses en local« , explique Romain Clappier.
Si tout le monde s’y met, il pourrait alors être possible d’élargir les lieux d’achat : des commerçants et artisans conventionnés, chez les producteurs locaux, en vente directe ou encore sur les marchés. »On ne pourra y arriver que si on s’y met tous« , dit le coordinateur de la caisse commune alimentaire. Un pari de la solidarité déjà en bonne partie relevé.
(Propos recueillis par Justine Salles et Pascal Dussol)
Écrit par Aude Henry Publié le 01/03/2025 à 18h21